L’Azerbaïdjan et l’Arménie ont signé dans la nuit, sous l’égide de la Russie, un accord de fin des hostilités dans le conflit du Haut-Karabakh.
Le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan a dit lundi soir avoir signé un accord « douloureux » pour mettre fin aux combats au Nagorny Karabakh qui font rage depuis maintenant six semaines. Dans un communiqué posté dans la nuit de lundi à mardi sur sa page Facebook, il a indiqué : « J’ai signé une déclaration avec les présidents de Russie et d’Azerbaïdjan sur la fin de la guerre au Karabakh », qualifiant cette initiative « d’incroyablement douloureuse pour moi et pour notre peuple ».
Le président russe a confirmé l’accord entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan de « cessez-le-feu total » des combats pour la région du Nagorny Karabakh en vigueur depuis 21 heures GMT lundi, quelques minutes plus tard. « Nous avons forcé (le Premier ministre arménien Nikol Pachinian, NDLR) à signer le document, cela revient à une capitulation », a dit pour sa part le président azerbaïdjanais Ilham Aliev à la télévision, « j’avais dit qu’on chasserait (les Arméniens) de nos terres comme des chiens, et nous l’avons fait ».
« Le 9 novembre, le président de l’Azerbaïdjan (Ilham Aliev), le Premier ministre de l’Arménie (Nikol) Pachinian et le président de la Fédération de Russie ont signé une déclaration annonçant un cessez-le-feu total et la fin de toutes les actions militaires dans la zone du conflit du Nagorny Karabakh à partir de minuit le 10 novembre heure de Moscou », a dit Vladimir Poutine, selon une déclaration diffusée dans la nuit de lundi à mardi aux médias.
Une foule en colère à Erevan
« Démission ! », « traître à la Nation » : l’annonce en pleine nuit par le Premier ministre arménien Nikol Pachinian consacrant la victoire militaire de l’Azerbaïdjan a été accueillie par des cris de rage et de dépit à Erevan. Des véhicules en trombe ont sillonné tout d’un coup les grandes avenues de la ville. Dans un concert de klaxons, les voitures se sont dirigées en direction du siège du gouvernement, sur l’immense place de la République entourée de ses imposants bâtiments de grès rose.Des groupes d’hommes en colère ont fait leur apparition dans les rues, marchant d’un pas vif en vociférant. « Nos soldats sont donc morts pour rien ! » Cris, insultes, invectives… le Premier ministre est la principale cible de toute cette hargne : « Pachinian démission ! » scandent des centaines d’émeutiers, rassemblés devant le siège du gouvernement, dont ils forcent peu après l’entrée. Des vitres sont brisées, un rideau arraché, un bureau dont le seul tort est d’être situé à proximité de l’entrée est saccagé, dossiers et plantes vertes sont jetés à terre. Les quelques policiers présents – de toute façon trop peu nombreux – ne sont pas intervenus.
« Qu’il nous explique pourquoi sont morts nos enfants ! »
Le président du Parlement a été tabassé et blessé, selon des images diffusées sur les réseaux sociaux. Des bureaux de députés, porte grande ouverte et feuilles à même le sol, ont été manifestement visités ou fouillés. Pas d’armes apparentes, mais là aussi des têtes plutôt louches se baladent dans les couloirs. Des bagarres éclatent à la tribune, une députée d’opposition s’épuise à essayer de prendre la parole sous les huées. Rebelote pour un officier qui s’est emparé d’un mégaphone. « Ferme ta gueule ! » crache une voix dans l’assistance en surchauffe. Deux minutes avant, un illustre inconnu un peu trop bavard s’est fait virer à coups de poing et de jets de bouteilles. Faites venir Pachinian, qu’il nous explique pourquoi sont morts nos enfants ! », « il faut déchirer l’accord de cessez-le-feu », « nos généraux doivent prendre le pouvoir », « Poutine viens nous aider ! »… À la tribune ou dans la foule qui se bouscule sur les bancs des députés, chacun tente son idée, sans succès, dans une atmosphère explosive et une foire d’empoigne augurant bien mal de la profonde crise politique qui vient de s’ouvrir en Arménie.
Des milliers d’Arméniens ont protesté contre l’accord de cessez-le-feu dans la nuit de lundi à mardi. © KAREN MINASYAN / AFP
Source AFP