L’avocate Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix en 2003, juge que le mouvement de protestation pourrait prendre plus d’ampleur encore que celui de 2009.
Pour Shirin Ebadi, « la situation économique et l’écart effrayant entre les riches et les pauvres (…) sont à la base de la protestation ».
« Je crois que les manifestations ne vont pas finir de sitôt. Il me semble que nous assistons au début d’un grand mouvement de protestation qui peut aller bien au-delà de la vague verte de 2009. Cela ne m’étonnerait pas que cela devienne quelque chose de plus grand. » C’est ce que déclare au journal italien La Repubblical’avocate iranienne Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix en 2003, et qui vit désormais en exil à Londres.
L’Iran a connu cette nuit de nouvelles manifestations contre le pouvoir durant lesquelles deux personnes ont été tuées, des dizaines arrêtées et des bâtiments publics attaqués. Il s’agit des plus importantes manifestations depuis le mouvement de contestation contre la réélection de l’ex-président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad en 2009, qui avait été violemment réprimé.
La situation économique et l’écart effrayant entre les riches et les pauvres (…) sont à la base de la protestation.
Mais, désormais, les racines de la colère sont avant tout économiques et sociales : « En Iran, et ce n’est pas nouveau, il y a une très grave crise économique. La corruption dans tout le pays est à des niveaux épouvantables. La fin de certaines sanctions liée à l’accord sur le nucléaire avec l’Europe et les États-Unis en 2015 n’a pas apporté de bénéfices réels à la population, contrairement à ce que beaucoup attendaient », explique Mme Ebadi. « À cela s’ajoute le fait que l’Iran a des dépenses militaires très élevées. Les gens ne tolèrent plus de voir tant d’argent dépensé pour cela », ajoute-t-elle. « Les jeunes sont les plus déçus », prévient l’avocate en évoquant le chômage élevé qui les touche, la corruption et « le climat de censure que l’on respire dans les rues ».
Et si des femmes sont également descendues dans les rues, « le mouvement actuel n’est pas une question de genre », assure-t-elle. « La situation économique et l’écart effrayant entre les riches et les pauvres, entre ceux qui jouissent du bien-être et ceux qui ne le peuvent pas, sont à la base de la protestation. Les écarts sociaux n’ont fait que s’agrandir ces dernières années et c’est un des éléments-clés pour comprendre ce qui se passe », insiste le Prix Nobel de la paix 2003.
SOURCE AFP