Les favoris pour le poste de président de la Commission ont été écartés, faute d’accord entre dirigeants. Un sommet de crise doit se tenir le 30 juin.
Trouver le successeur de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission européenne s’avère plus difficile que prévu. Le sujet irrite à Bruxelles, où aucun consensus ne semble se dégager. Jeudi, les négociations engagées entre les 28 pays membres n’ont rien donné. En conséquence, le président du Conseil, Donald Tusk, a annoncé dans la nuit de jeudi à vendredi qu’un sommet de crise aurait lieu le 30 juin prochain : « Il n’y a eu de majorité sur aucun candidat. Nous nous retrouverons le 30 juin. Je vais poursuivre les consultations. » D’ici là, les dirigeants européens ont également prévu de se réunir ce vendredi pour évoquer le budget de la zone euro.
Les maigres espoirs de parvenir à une solution avaient été douchés par Donald Tusk à l’issue d’un entretien avec le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel. « Hier, j’étais prudemment optimiste. Aujourd’hui, je suis davantage prudent qu’optimiste », avait-il annoncé sur son compte Twitter après sa rencontre avec les deux dirigeants. Emmanuel Macron refuse la nomination du prétendant défendu par Angela Merkel, l’Allemand Manfred Weber, 46 ans, candidat désigné par le Parti populaire européen (droite). Le sommet s’était ouvert avec un camouflet infligé à Angela Merkel : l’annonce, par les chefs des groupes socialiste et centriste Renew Europe au Parlement européen, qu’ils ne soutiendraient pas la candidature de Manfred Weber en cas de vote, signifiant la fin de ses espoirs de réunir une majorité pour pouvoir présider la Commission européenne.
Emmanuel Macron s’est dit satisfait de ce lâchage et du résultat du sommet. « Je n’ai pas le sentiment d’avoir vécu un échec », a-t-il déclaré. « Les noms des trois spitzenkandidaten (prétendants des partis) ont été écartés. Ils ont été testés par Donald Tusk, qui a considéré qu’il n’y avait pas de majorité sur ces trois noms », a-t-il souligné. Les deux autres prétendants sont le Néerlandais Frans Timmermans pour les socialistes et la Danoise Margrethe Vestager pour les libéraux-centristes de Renew Europe. Angela Merkel a pris acte de ce blocage. « Je vais consulter nos partis (membres du PPE) après le constat dressé par Donald Tusk parce que les présidents des groupes socialiste et RE (Renew Europe) ont dit qu’ils ne pouvaient pas soutenir Manfred Weber », a-t-elle annoncé.
Une répartition des postes de pouvoir
L’élu, qui succédera le 1er novembre au Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, devra obtenir le soutien de 21 des 28 dirigeants européens et rallier une majorité d’au moins 376 voix au Parlement. Une répartition des quatre postes de pouvoir de l’UE a été proposée, ont indiqué à l’Agence France-Presse plusieurs responsables européens. Le PPE, premier groupe au Parlement, revendique la présidence de la Commission européenne, et cette exigence n’est pas contestée, mais il faudra un autre candidat que Manfred Weber, ont précisé ces sources. Les libéraux veulent la présidence du Conseil européen et les socialistes obtiendraient le poste de chef de la diplomatie européenne et se partageraient les cinq années du mandat de présidence du Parlement avec les Verts, à raison de deux ans et demi chacun.
Reste à trouver les noms pour chacune des fonctions. Le Premier ministre libéral du Luxembourg Xavier Bettel a déclaré ne pas être candidat. Le Belge Charles Michel, cité pour la présidence du Conseil, n’a pas fait de déclarations. L’accord devra respecter des exigences de parité et d’équilibre géographiques. Donald Tusk s’est engagé à faire nommer deux femmes. Plusieurs autres sujets difficiles ont été inscrits à l’ordre du jour de ce sommet. La tentative d’inscrire la date de 2050 comme celle d’une Union neutre en émissions de carbone, a échoué après cinq heures de difficiles négociations, bloquée par une poignée d’États d’Europe de l’Est menés par la Pologne.
Les accusations du PPE contre la France et l’Espagne
Grands consommateurs d’énergie fossile, ils ont refusé de s’engager sans garanties concrètes de pouvoir financer leur transition énergétique. Les dirigeants européens ont engagé leurs discussions sur les nominations après ce premier échec. Les déclarations des responsables du PPE montraient une irritation contre le mauvais coup porté contre leur prétendant. « La prise de position des chefs des groupes libéraux et socialistes a été prise à Paris et à Madrid », ont-ils accusé. Le constat d’échec a été établi après quatre heures de discussions. « J’ai constaté avec un certain plaisir, amusement ou bonheur qu’il n’est pas très facile de me remplacer », a ironisé Jean-Claude Juncker. Le président de l’exécutif européen est en fonction jusqu’au 31 octobre minuit.
Un accord sur le nom de son successeur doit être trouvé avant le 2 juillet, jour de la session inaugurale du nouveau Parlement au cours de laquelle il doit élire son président. « Il faut trouver rapidement un accord, car nous devons avoir une Commission européenne opérationnelle pour gérer le Brexit, surtout si Boris Johnson devient Premier ministre du Royaume-Uni », a insisté un diplomate de haut rang. Les discussions doivent se poursuivre en marge du sommet du G20 à Osaka les 28 et 29 juin, a indiqué Jean-Claude Juncker.
Le Point.fr avec AFP