Le président américain Donald Trump est bousculé, mais les accusations de racisme pourraient ne pas rapporter des voix aux démocrates pour autant
Après la fusillade ce week-end au Texas, les candidats démocrates sont montés au créneau se répandant dans tous les médias pour attaquer de manière virulente Donald Trump, l’accusant de diviser le pays, de susciter la haine, et d’avoir inspiré avec ses tirades incendiaires Patrick Crusius, le tueur. « C’est un raciste, ça ne fait aucun doute pour moi », a déclaré la sénatrice Kamala Harris en parlant du président des États-Unis, à des journalistes à Las Vegas. « Il est responsable (du massacre) parce qu’il agite les peurs, la haine et le sectarisme », a renchérit le sénateur Cory Booker, autre présidentiable. « C’est un raciste qui attise le racisme dans ce pays », a ajouté Beto O’Rourke, ancien congressman du Texas et aspirant au Bureau ovale.
Déclarations incendiaires
Ce n’est pas la première fois que les démocrates condamnent les propos de Donald Trump. Après la mort d’une jeune femme lors de la marche de néonazis à Charlottesville il y a deux ans, ils s’en étaient pris par exemple au président qui avait condamné mollement les violences. Ils ont aussi régulièrement dénoncé ses tweets traitant les Mexicains de « violeurs », parlant de « l’invasion » des migrants… Mais jusque-là, ils étaient restés relativement prudents, échaudés par la campagne de 2016. Hillary Clinton, surtout à la fin, avait présenté Trump comme un type dangereux qui fait le jeu des nationalistes blancs et donc, inapte à la fonction présidentielle. Un argument qui n’a pas contribué, comme elle l’escomptait, à sa victoire.
Ces derniers mois cependant Donald Trump a multiplié les déclarations incendiaires. Il a dit à quatre élues démocrates issues de minorités (dont trois nées aux États-Unis) de « rentrer chez elles ». Dans un meeting en Floride, alors qu’il demandait à la foule comment stopper les migrants, quelqu’un a hurlé : « tirons-leur dessus ». Le président des États-Unis a souri sans condamner la sortie. Parallèlement, selon un sondage récent, 51 % des électeurs le qualifient de raciste. Le massacre du supermarché Walmart a finalement décidé les démocrates à se mobiliser. Contrairement à Hillary Clinton qui avait dit que « la moitié » des partisans de Trump étaient « lamentables » à cause de leurs vues racistes – une gaffe monumentale –, les candidats habilement ont ciblé leurs attaques contre Donald Trump le rattachant au tueur, dont le manifeste reprend mot pour mot des phrases du président.
Donald Trump va-t-il changer de discours ?
Il est bien trop tôt pour savoir si la fusillade d’El Paso va leur ramener des voix. On est encore à plus d’un an du scrutin et Trump a réussi jusqu’ici à passer souvent entre les gouttes. Mais la fusillade, à court terme, va réorienter le débat sur la question raciale. Et permet, au moins temporairement, aux démocrates de montrer un front uni et de faire oublier les divisions du dernier débat. Les candidats sont tous favorables à plus de restrictions sur le port d’armes.
Quant à Donald Trump, soudain sur la sellette, le massacre d’El Paso va-t-il l’obliger à calmer le ton ? Pas sûr. Car derrière ses tweets et ses déclarations à l’emporte-pièce, il y a un calcul. Sa stratégie de campagne, c’est de mobiliser sa base, notamment les Blancs qu’il a gagnés avec plus de 20 points, les personnes âgées et les évangéliques, pour qu’elle se rende aux urnes en 2020. Or, il sait que ses partisans sont très anti immigration et que quoi qu’il fasse ou dise, ils le soutiendront fidèlement sans broncher. Ensuite, ses conseillers estiment que plus il fait de déclarations choquantes, plus les candidats aux primaires essaient de se démarquer et se gauchisent, ce qui effarouche les centristes et fait le jeu de Trump. Enfin, ils y voient aussi un moyen insidieux de décourager Noirs et les Latinos, habituellement démocrates, qui se diront que ce n’est pas la peine d’aller voter puisque rien ne change. Les républicains n’ont plus qu’à prier que les extrémistes et les détraqués de tout poil ne déclenchent pas de nouveau massacre de Latinos ou de Noirs dans les mois qui viennent.
Par Hélène Vissière